Avec cette deuxième triade, je vous invite à poursuivre « notre balade en lune » telle que je vous l’avais présentée dans le blog il y a quelques jours.
Remarque : comme précédemment, les quelques mots de présentation de chaque poète sont tirés de l’ouvrage de François Cheng.
Ch’ien Chi (722-780 ?) est ami de Wang Wei, il croit au pouvoir orphique de la poésie.
Passant la nuit en compagnie d’un pêcheur sur la rivière Lan-T’ien
Seul en voyage, maintes fois j’oublie le retour.
D’autant moins je le regrette quand le lieu est reclus.
Trempant mes cheveux dans la source fraîche et claire
Longuement je me laisse retenir par la clarté lunaire.
Attirante est la figure du vieux pêcheur, là,
Calme et immobile, pareil à l’aigrette sur le sable.
En partage nous n’avons qu’un cœur de nuage blanc
Ensemble nous savourons le délice de l’espace sans limite.
Parmi les roseaux, les feux nocturnes peu à peu s’éteignent ;
Bientôt les monts d’automne accueilleront l’aube.
Destin des oiseaux qui s’assemblent puis se séparent :
En leur errance n’est-il jamais de retrouvailles ?
Tu Mu
A la fin des Tang, Tu Mu (803-852) chante la nostalgie et la passion amoureuse.
Le bleu des monts le vert des eaux s’estompent,
lointains.
Sud du fleuve, fin de l’automne, l’herbe n’est point
fanée.
Ville aux vingt-quatre ponts, nuit tout inondée de lune :
Où est ton chant de flûte ? Près de quel être de jade ?
Li Shang-Yin
Les poèmes d’amour de Li Shang-yin (813-858) comptent parmi les plus beaux de la poésie chinoise.
Les rencontres – difficiles ; les adieux – plus encore…
Le vent d’est a faibli, les cent fleurs se fanent.
Le ver à soie, tant qu’il vit, déroulera sans cesse son fil ;
La bougie ne tarira ses pleurs que brûlée et réduite en cendres.
Miroir du matin où pâlit le nuage des cheveux ;
Chant de la nuit : échos glacés dans la fraîcheur lunaire.
D’ici jusqu’aux Iles Immortelles, la route n’est plus longue…
Persévérant Oiseau Vert, veille sur notre voyage !
(Les Iles Immortelles sont les îles P’eng-lai dans la mer Orientale)